Mythologie Basque : Etxejaun le « seigneur de la maison »

Etxejaun, le seigneur de la maison basque

En langue basque, le mot Etxejaun (ou Etxajaun, selon les variantes locales) signifie littéralement « le seigneur de la maison ». Dans la mythologie basque, il désigne un génie nocturne, un gardien du foyer et incarnation des ancêtres protecteurs.

Le terme etxeko jaun se traduit par « maître de maison ». Mais, au Pays basque, cette expression dépasse de loin le cadre domestique. L’etxea – la maison – est bien plus qu’une simple habitation : elle représente le centre du monde, un univers symbolique où se croisent les vivants, les morts et la mémoire des générations.

L’historien des religions Mircea Eliade écrivait que « l’habitation n’est pas un objet, une machine à habiter : elle est l’univers que l’homme se construit en imitant la création exemplaire des dieux ». Cette vision trouve au Pays basque un écho tout particulier : l’etxea n’est pas seulement un lieu, c’est une cosmogonie à échelle humaine.

La maison, âme du monde basque

Selon l’anthropologue Patxi Hartsuaga, les Basques sont des êtres topiques : ils s’enracinent dans un lieu qu’ils nomment etxe, à la fois abri, repère social et unité politique fondamentale. C’est un espace où l’on existe par et pour la maison, au point d’en adopter le nom. Ainsi, dans bien des villages, on se présente non pas par son patronyme, mais par celui de la maison : Etxeberria, Goikoetxea, Mendiondo…

L’Etxejaun incarne cette continuité : il est la mémoire vivante des ancêtres, le gardien du feu, celui qui veille lorsque la famille dort. On parle souvent de ces esprits au pluriel : les etxekojaunak – les seigneurs de la maison.

Les esprits du foyer

Dans les récits populaires, les etxekojaunak visitent la cheminée une fois la famille couchée et les braises bien tassées. Ils protègent la demeure et assurent la prospérité du foyer. Mais attention : leur bienveillance dépend du respect qu’on leur accorde.

Malheur à celui qui laisse la vaisselle sale, éteint le feu du foyer ou oublie les offrandes ! Ces esprits savent alors se montrer grincheux : ils pinceraient ou secoueraient les dormeurs, rappelant à chacun l’importance du travail, de la propreté et du respect du feu sacré.

Des noms multiples selon les vallées

Si le terme etxekojaunak est attesté à Domezain, d’autres noms désignent ces génies ailleurs au Pays basque. L’ethnographe Jean-François Cerquand notait déjà que ces esprits, toujours masculins, avaient pour équivalentes féminines les laminak – créatures mystérieuses qui vivaient autrefois dans les champs et les rivières, avant d’être chassées par le légendaire Roland.